Interview de Celly DANCE

LA FEMME AUX MILLES DANSES

Pouvez-vous me rappeler votre cursus dans le milieu de la danse ?  
J’ai commencé la danse à 4 ans. J’ai d’abord été danseuse classique en conservatoire pendant 12 ans, puis je me suis intéressée au Moderne jazz et au hip-hop que j’ai exercé pendant 3 ans. J’ai ensuite découvert les danses afro, danse africaine et ragga jam, puis ragga jam salsa avec Agnès pendant 3-4ans. J’ai commencé la danse de couple à l’université à 23 ans avec une dame qui m’est chère, Bernadette David, qui a eu également pour élèves plusieurs personnes reconnues sur Paris (Stou dance, julien dj69, Hyacinthe et Sergio du factory de Thiais…). Elle m’a enseigné à écoute la musique avant de me lancer dans mon corps. J’ai appris avec elle, la salsa cubaine, le rock, les danses de salon et des danses folkloriques. J’ai poursuivi mon apprentissage, pour savoir enseigner, auprès de Tinan leroy pour travailler ma musicalité d’arrache-pied des journées durant. hyacinthe m’a transmis beaucoup de sa pédagogie, Aramndo Del Bene m’a enseigner beaucoup de portés et autres figures d’acrobatie. Je me suis nourrie théoriquement et de façon pratique également auprès des différents artistes de nombreux festivals que j’ai eu l’occasion de faire. Les différents partenaires avec qui j’ai travaillé mon également fait sortir de mes zones de confort pour me faire découvrir toujours plus autour de l’univers de la danse (houcine, alix, Pika, toi Nizard ^^).
 
Depuis combien de temps enseignez-vous les danses de couple ?  
J’enseigne depuis 13 ans. J’ai commencé, j’avais 24 ans. J’ai travaillé pendant une année pour me former dans l’enseignement et l’apprentissage des différentes danses de couple pour me lancer sur le terrain.
 
Pouvez-vous m’expliquer comment vous organisez vos cours ?  
J’ai une méthode très stricte mais qui ne transparait pas tant que ça durant mes cours. Échauffement le temps d’une musique/15min d’explication et 3-4min de pratique en musique x3/Démo de fin. 
Durant le cours je décris les mouvements en précisant des éléments du corps qui sont mobilisés, pour apporter une attention à ce qui se joue chez l’autre et chez soi, afin de rendre l’élève conscient et autonome dans ses mouvements et ce qu’il génère chez son/sa partenaire. Cela a également un objectif de sécurisation, certains mouvements pouvant être dangereux s’ils sont mal exécutés. J’explique un maximum avec des images qui parlent à tous. Je tente parfois d’inverser les rôles, leader/follower, afin de favoriser la mise en ressenti de chacun (éprouver la sensation des mouvements lorsque je suis à la place de l’autre). J’utilise l’humour pour permettre aussi la décontraction cognitive. Oui, le rire favorise un sentiment de plaisir et de moment sympa, mais cela facilite aussi l’intégration d’information, surtout lorsqu’on se sent figé, en surcharge cognitive, en sentiment d’échec par ce qu’on ne comprend pas… Je tente, autant que je peux d’encourager et de valoriser, tout en rassurant sur les difficultés que le sujet peut rencontrer quand il danse. Et oui, la danse ce n’est pas simple, surtout à deux. Cela impose énormément de lâcher prise, de mise en danger, de rapport à l’autre et à soi, et tout cela peut être anxiogène, peut amener à un sentiment d’incapacité, et j’en passe. Alors rassurer et valoriser permet un maintien de nos efforts jusqu’au jour où, ça y est, on se sent en accord, où la technique s’est incorporée, on l’a fait sienne, et c’est un nouveau mode de communication que l’on manie avec aisance et plaisir !
 
Quelles sont les qualités et les compétences que l’on doit avoir pour faire ce métier ?  
Qu’elle question difficile ! Ma réponse sera forcément différente d’un autre. Je crois que l’important c’est d’être au maximum congruent, honnête avec le sujet à qui l’on transmet, honnête avec soit, honnête vis-à-vis de nos limites, tenter de se former au quotidien, être passionné dans cette danse que l’on transmet pour favoriser l’émergence de la passion chez l’autre. Pour ma part, cela est passé par le confort de la formation dans de nombreuse danse, dans l’expérience sur la scène de danse et sur la scène sociale, la rencontre avec des professionnels de la danse de tout univers, accueillir la passion et les critiques de chacun, mais aussi écouter les représentations des autres mêmes si ce n’étaient pas les miennes. Finalement, pour moi, les compétences à avoir en passe par une ouverture, une formation constante, une congruence, et une passion qui nous anime et nous donne ce souhait bienveillant de transmission.
 
Quelles sont les inconvénients du métier ?  
Il y en a probablement plein, mais heureusement que ce n’est qu’une petite part d’ombre face à tout ce que cela peut apporter de positif. 
Je dirais qu’un point important est la mésestime de l’importance de la formation, et le fait que c’est un métier à part entière. Comme les gens viennent nous voir pour faire une activité divertissante, une activité artistique après leur travail pour le plus grand nombre, cela peu apporté un souffle pour se détendre mais impacter la représentation de ce métier. Au-delà de l’animation offerte, il y tout un corps théorique, un accompagnement de la relation sociale, d’ajustement à l’autre, et j’en passe. Et pour nous entant que pro, il y a des heures et des heures de travail, d’épuisement, d’argent dépensé dans nos heures d’apprentissages, dans nos salles de répètes, nos tenues. Il y aussi tous ces moments d’échecs et tous ces moments où l’on se relève pour remonter sur le cheval avant une autre chute. Mais tout cela nous forge, nous crée, ce sont nos expériences, qui nous font exister entant que professeur de qualité. Et tout cela est bien trop souvent mésestimé. La danse est trop souvent perçue comme un outil de consommation, du obit, alors on casse les prix, et comme il n’y a pas de diplôme de prof de danse de couple, alors il n’y a pas de cadre limitant. Chacun souhaitant être au-devant de la scène, à la recherche de notoriété, (d’autant plus avec les outils de mise en image d’aujourd’hui, tel que Facebook), peut être amené à finir sa journée de travail avec un petit cours d’une heure, qu’il donnera à prix bradé, venant impacter le marcher de l’emploi pour les professeurs qui en ont fait leur profession principale, après une formation sérieuse et coutante. Et qu’en sera-t-il alors du résultat de ces formations bradées sur le niveau des futurs danseurs de la scène sociale ? 
Une autre limite dans notre société actuelle, c’est l’image, oui j’en parle encore ! Avec le développement des réseaux sociaux, nous avons développé nos outils de communication. Communication écrite, mais surtout visuelle ! Cela impose une mise en image, un rapport à ce qu’on expose de soi, et cela n’est pas toujours simple entant que femme. Qu’est que je veux renvoyer comme image de moi, qu’est que je souhaite transmettre sur l’image de la femme dans la danse… La question est délicate, mais cela est un autre débat !
Il y a encore d’autres inconvénients à exposer, mais je me rassure sur un point, il y aura toujours plus de beauté et d’enrichissement dans ce beau métier qu’est l’enseignement de la danse.
 
Avez-vous eu des mentors ou avez vous pris exemple sur des personnes pour évoluer dans le milieu ?  
Toutes les personnes que j’ai cité plus haut dans mon parcours, m’ont influencé. Bernadette David et Tinan leroy ont été, parmis tous, des personnes particulièrement influençantes. Ils ont su me mettre en grande difficulté, me faire aller plus loin, me toucher, me faire vibrer, m’imposer des limites, et ouvrir aussi des portes insoupçonnées. J’espère pouvoir croiser encore des personnes comme elles. J’ai la chance de connaitre quelqu’un aujourd’hui qui à une passion si forte qu’il déplacerait des montagnes pour faire exister ses rêves et faire naitre la passion chez d’autres ! Alors merci Nizard d’avoir toi aussi croisé ma route et m’avoir influencé dans mon parcours.
 
Quels sont vos projets pour l’année 2021 ?  
Sortir de la crise du Coronavirus ? lol
Pour le moment, je me centre plus sur le développement de mon autre domaine professionnel qui est la psychologie (formations en thérapies brèves, ouverture de cabinet, création de site internet, écriture d’un livre…). A la sortie de cette crise je retournerai sur la piste pour enfin retrouver cette sensation de plaisir et retrouver une nouvelle envie de projet pour la danse. Alors, rendez-vous au prochain épisode…
 
D’après vous, que manque t-il dans le milieu en France au milieu de la danse?
Je pense qu’il manque un cadre pour l’ensemble des danses de couple, concernant l’enseignement. Mais cet argument peut également questionner puisque les danses de couple, pour la majorité, sont issues de l’expression libre, chose qui favorisait à l’origine, une forme d’expression, de communication, de libération… sans limites, sans censures… Alors, si des règles devaient poser des limites sur l’enseignement, les modalités de formations, etc…, cela devrait être fait avec une écoute et une analyse attentives de la culture de chaque danse, des échanges, de la bienveillance, de la remise en question et j’en passe.
Autre point que j’aimerais questionner, c’est ce rapport à l’image. Ah l’image !! Comment la protéger, comment garantir une bienveillance, une transmission autour de l’image, qui soit sécurisante pour tous, ouverte, non discriminante, respectueuse de chacun… Les mots me manquent pour exprimer ce questionnement que j’ai sur cette notion de l’image, mais cela pourrait faire l’objet d’un autre débat !
Merci pour cette opportunité d’expression et ces questionnement pertinent qui m’ont imposé de fouiller en moi et de me livrer sans limites 😉

Interview réalisé par Nizard MAHARSI.

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